Né à Saintes le 8 septembre 1924, Guy-Pierre Gautier s’engage dans la Résistance à l’âge de 17 ans, au printemps 1943, au contact des jeunes de l’Athlétique ouvrier rochelais.
Agent de liaison, il diffuse des tracts appelant à l'action contre l’occupation nazie. Tout en travaillant dans une usine d'aviation, il est chargé de former le premier groupe armé FTP sur La Rochelle, le détachement Liberté, en compagnie notamment de Jean Matifas, Jean Rebière et Robert Sude. Nommé lieutenant, il recrute des jeunes répartis sur le département en petits groupes de quatre ou cinq qu'il forme. Il organise le renseignement et mène de nombreuses actions de sabotage (voies ferrées, lignes téléphoniques, dépôt de carburant...). Il assure le transport de tracts et de matériel entre Paris et La Rochelle.
Mais, son groupe repéré, il est arrêté le 22 octobre 1943 par la Gestapo et la police française, enfermé a la prison de Niort avec ses camarades, roué de coups au cours de terribles interrogatoires, puis condamné à 12 ans de travaux forcés. Après la prison de Niort, il arrive à Eysses en janvier 1944 où il est affecté au préau 2 avec le matricule 623. Costume de bure marron, il est surpris de garder ses souliers et ses cheveux. Surpris aussi de l'accueil chaleureux des 200 membres du préau 2. Il a droit avec ses amis à un discours de bienvenue de Victor Michaut, l’un des responsables du collectif des détenus de centrale d’Eysses. Face à cet enthousiasme, il s'est senti « à deux doigts de la libération ».
Il s’intègre très vite au collectif des détenus. Lors de la préparation de la fête de la jeunesse dans la prison le 16 janvier 1944, il aide à peindre le portait du général de Gaulle. Il participe à l'écriture d'articles dans les journaux clandestins qui circulent dans la prison. Il rencontre un gaulliste, le docteur Weil en veste bleu clair et pantalon de velours, Henri Auzias, le délégué communiste, Georges Charpak et Raymond Prunières. Il apprécie les débats, la diversité des personnalités et au- dessus de tout, la solidarité nécessaire des gourbis, le partage des colis, l'amitié totale, « une impression énorme ».
Il participe activement à la tentative d’évasion collective du 19 février, chargé de garder l’Inspecteur général des prisons pris en otage avec le directeur milicien de la centrale d’Eysses.
Après l’échec de l’insurrection, c’est la répression féroce organisée par les autorités de Vichy : douze résistants fusillés le 23 février ; les 1200 autres livrés à la division SS Das Reich ; le transfert dans des conditions particulièrement inhumaines vers Compiègne puis la déportation vers les camps de concentration. « À l’arrivé à Dachau, on a commencé par sortir les morts des wagons. »
"J’ai été affecté à l’usine BMW, puis dans le bâtiment, à charrier des bacs de ciment. On faisait très attention quand on croisait un SS, parce qu’un simple coup d’épaule et on pouvait se retrouver coulé dans le béton. Plusieurs camarades ont disparu comme ça."
Guy-Pierre est ensuite affecté « au nettoyage du camp », c’est-à-dire au transport des cadavres jusqu’à un wagon baptisé “Mort express”. Le 29 avril 1945, les Américains libèrent le camp de concentration de Dachau, mais « ils bouclent le camp pour nous empêcher de sortir à cause du risque de contagion du typhus. »
Ce n’est que le 8 juin que Guy-Pierre revient à La Rochelle, un mois après la Libération.
Guy-Pierre Gautier a longtemps gardé le silence sur son histoire douloureuse « qu’il voulait oublier », jusqu’à ce qu’il soit décoré de la Légion d’Honneur le 8 mai 2015, et qu’à cette occasion il se confie à ses proches, comme à son petit-fils avec lequel il a raconté de façon émouvante et réaliste cette histoire, sous la forme d’une très bonne bande dessinée dans laquelle de nombreux anciens d’Eysses auraient pu se reconnaître.
Guy-Pierre Gautier apparaît aussi dans le film documentaire de Stéphane Bihan « Eysses, une épopée résistante », marqué par ses interventions bienveillantes et son modeste sourire. Il est décédé le 30 décembre 2024 à La Roche-sur-Yon.