André LAULAN
Association Eysses
  • Informations
    • Nom : LAULAN
    • Prénom(s) : André
  • Etat civil
    • Date de naissance : 12/08/1918
    • Ville de naissance : Mazères
    • Département de naissance : Gironde
    • Pays de naissance : France
    • Profession avant guerre :
      - cultivateur
    • Date de décès : 10/11/1944
    • Lieu de décès : Bergen-Belsen
  • Résistance
    • Organisation(s) de résistance :
      - Parti communiste
      - FTP
      - Bordeaux-Loupiac
    • Pseudonyme : Gérard
    • Département(s) de résistance : Gironde
  • Arrestation et condamnation
    • Date d'arrestation : 28/5/1943
    • Lieu d'arrestation : Puybarban
    • Département d'arrestation : Gironde
    • Juridiction de condamnation : Section spéciale - Agen
    • Date de condamnation : 04/11/1943
    • Motif(s) de condamnation :
      - Recel de malfaiteur
      - détention de tracts
      - vol de cartes d'alimentation
    • Peine infligée : Prison
    • Durée de la peine : 18 mois
    • Parcours carcéral :
      - La Réole
      - Agen
      - Eysses
      - Compiègne
  • Eysses
    • Date d'arrivée à Eysses : 22/11/1943
    • Numéro d'écrou à Eysses : 2636
    • Préau ou autre affectation :
      - Préau 1
    • Compagnie de combat : 1ère Cie Heyriès
    • Section de combat : Gabalda Joseph
    • Motif de la levée d'écrou : Remis aux autorités allemandes
    • Date de la levée d'écrou : 30/05/1944
    • Durée de détention : 0 an(s), 6 mois, 8 jour(s)
  • Déportation
    • Déporté
    • Lieu de départ : Compiègne
    • Date de départ : 18/06/1944
    • Parcours concentrationnaire :
      - Dachau
      - Hersbruck (Kdo Flossenbürg)
      - Bergen-Belsen
    • Matricule : 73640
    • Situation en 1945 : Décédé
    • Date : 10/11/1944
    • Lieu : Bergen-Belsen
  • Reconnaissance
    • Statut : Déporté résistant
    • Mort pour la France
    • Médaille de la Résistance
    • A titre posthume
    • Date du décret MRF : 24/05/1957

André LAULAN

Par : Jean-Claude Laulan

Fils d’Andréa Virepinte et d’Augustin Laulan, ouvriers agricoles, André Laulan nait à Mazères (Gironde) le 12 août 1918. La famille qui s’est augmentée d’un second fils, René, né le 23 juillet 1921 à Le Nizan (Gironde), va s’établir dans une petite propriété prise en fermage, en1928, à Puybarban (Gironde).

Après l’obtention de son Certificat d’études primaires, André va travailler à la ferme familiale avec ses parents. Son père Augustin est un fervent supporter de Renaud Jean, « le tribun des paysans », premier député communiste du Lot-et-Garonne, élu en 1932, dans la circonscription de Marmande, qui jouxte la Gironde. André va rapidement adhérer aux Jeunesses Communistes, et il va être chargé, début 1938, de développer en Lot-et-Garonne l’Union des Jeunesses Agricoles de France.

André est incorporé au 121e régiment d’infanterie le 15 octobre 1938. Il est réformé après 10 mois de service militaire le 31 août 1939 pour « insuffisance mitrale et insuffisance aortique, souffle systolique de la pointe, souffle diastolique de la base. Hypertrophie globale du cœur. Maladie constatée par le fait du service le 27/08/1939…».

Sa santé lui permet peu de participer aux travaux des champs. Muni de son Certificat d’études, d’une bonne orthographe et d’une calligraphie parfaite, il va devenir l’adjoint du secrétaire de mairie de Puybarban. Cette fonction s’avère précieuse dans son engagement de résistant, notamment pour l’utilisation des cachets officiels de la mairie dans la réalisation de faux papiers ou de cartes d’alimentation.

Dès la signature de l’armistice et la mise en place de la ligne de démarcation, Puybarban, située en zone non occupée, permet à André d’obtenir un laissez-passer de la Kommandantur pour consulter un cardiologue à Bordeaux. Cette relative liberté de mouvement est précieuse pour réorganiser le Parti Communiste en Sud-Gironde et faire franchir la ligne de démarcation aux responsables clandestins du parti, se procurer l’Humanité interdite et les tracts à distribuer… 
« Il est en 1942 le seul responsable de la Gironde libre auprès de l’organisation FTPF, en contact permanent avec les responsables régionaux de la Résistance… ». Il effectue un travail de liaison entre les groupes- francs du Lot-et-Garonne et de la Gironde non-occupée, participe à la constitution, au transport et aux dépôts d’armes, au sabotage de l’écluse de Hure sur le canal latéral de la Garonne. Sous le pseudo de « Gérard », il est aussi agent du réseau d’évasion Bordeaux-Loupiac en Gironde, une filière d’évasion des aviateurs anglais, dépendante du BCRA, particulièrement active en Bretagne, organisée sur les grands axes ferroviaires. Et la gare de La Réole, à quelques kilomètres de Puybarban, est la première, sur la voie Bordeaux-Toulouse, pour sortir de la zone occupée.

La maisonnée est entrée en résistance ! Son jeune frère René et son épouse Suzette Pourrat, travaillent maintenant dans la ferme familiale. La maison, un peu à l’écart de la route et à l’orée de la forêt, devient (et restera jusqu’à la Libération) un centre d’hébergement clandestin, où trouveront asile quelques heures ou quelques jours, de nombreux militants communistes, agents de la Résistance recherchés par la police, dont Louis Pouzoulet, qui deviendra à la Libération, directeur de la Maison de repos des FTPF à Penne d’Agenais. Il y aura bien quelques descentes de la gendarmerie dans la ferme, mais rien, ni personne, ne sera trouvé, les « recherchés » ayant pu rejoindre la forêt.

En juin 1942, première alerte pour André : une carte d’alimentation portant le timbre de la mairie de Puybarban est retrouvée sur un « chef illégal communiste » arrêté à Bordeaux. André arrive à se disculper. L’affaire en reste là. Mais il sait avoir donné cette carte à Pierre Giret, qu’il a hébergé, fait franchir la ligne de démarcation, et qui, on l’apprendra plus tard, sera « retourné » par le sinistre commissaire Poinsot de Bordeaux, lui livrera des dizaines de communistes girondins et landais, et deviendra l’« agent 155 » de la Gestapo. André ne se sent plus en sécurité dans la ferme familiale. Il en fait part à Léopold Sacriste, un ami et voisin, sympathisant communiste, mutilé de la guerre 14/18 qui aménage une cache dans sa propre maison pour les tracts et brochures du parti et met une chambre à sa disposition.

Le 26 mai 1943, André et Léopold sont dénoncés à la gendarmerie de La Réole, par un de leur voisin, zélé collaborateur de Vichy, et un jeune neveu de Léopold, que manipule le délateur. Deux perquisitions simultanées sont organisées : rien n’est trouvé au domicile d’André, mais chez Léopold sont découverts quelques tracts et brochures communistes, quelques cartouches de chasse, un cordon Bickford et de la poudre de mine qui lui permettent de fendre les souches d’arbres ! André va dédouaner Léopold de toute responsabilité dans la détention des tracts. Mais ils sont incarcérés le 28 mai à la prison de La Réole. Le dossier d’instruction va rapidement s’enrichir de la carte d’alimentation trouvée sur Giret en juin 1942 et des quelques révélations qu’il a pu faire. Mais rien ne sera découvert de la responsabilité d’André dans l’organisation FTPF, dans le sabotage de l’écluse de Hure, ou le transit des responsables clandestins par la ferme familiale.

Le 4 novembre 1943, la Section spéciale de la Cour d’appel d’Agen livre son verdict :

  • Laulan André : inculpé de propagande communiste, recel de malfaiteurs, vols de cartes d’alimentation ; condamné à 18 mois d’emprisonnement et 1200 francs d’amende
  • Sacriste Léopold : inculpé d’activité communiste, détention de munitions ; condamné à 6 mois de prison et 1200 francs d’amende. Il est libéré, la peine étant couverte par la détention préventive
  • Laulan Augustin et Virepinte Andréa, épouse Laulan : inculpés de recel de malfaiteurs ; condamnés à 8 mois de prison avec sursis.

Le 22 novembre 1943, André est incarcéré à la Centrale d’Eysses, matricule 2636, au préau 1.

L’abondant courrier envoyé par André à ses parents durant son internement permet de connaitre les noms de quelques membres de son gourbi : Gabriel Canal, de Toulon, Joseph Gabalda et Henri Brinetti, tous deux marseillais. Ce dernier, dès sa libération des camps, viendra remercier les parents d’André de leur solidarité, et au titre de capitaine aux effectifs de la 1ère Compagnie du Bataillon d‘Eysses, leur délivrera une « attestation » indiquant notamment que lors de la bataille d’Eysses des 19 et 20 février, André, membre de l’organisation militaire clandestine, était « chargé de la liaison entre la compagnie et le poste de commandement du bataillon d’Eysses ».

Début avril, André est admis à l’infirmerie, « il y fait rentrer beaucoup de médicaments que nous-mêmes avons collectés » signale son père.

Avec tous ses camarades, il est livré aux nazis de la division SS « Das Reich » le 30 mai 1944 pour être transféré de Penne d’Agenais à Compiègne, puis le 18 juin de Compiègne à Dachau (matricule 73640).

Il est transféré le 21 juillet 1944 de Dachau à Flossenburg où il arrive le 22 juillet dans un convoi de 500 déportés de toutes nationalités. Parmi eux, plus d’une centaine de français, dont 59 camarades d’Eysses. Il est affecté du matricule 13230 , et de la profession d’…« électricien » ! Ce convoi ne fait que transiter par Flossenburg. Il repart le 25 juillet pour le camp d’Hersbruck (un kommando de Flossenburg) avec 485 déportés dont 56 Eyssois. André est qualifié cette fois de… « manœuvre ». Seuls 7 de ces Eyssois reviendront de déportation : Hersbruck est un camp d’extermination.

Un an après la libération des camps nazis, la famille, est toujours sans nouvelle d’André, considéré comme « non-rentré » de Dachau. Le 27 juillet 1946, le ministre des Anciens combattants et victimes de guerre « …décide la disparition de André Laulan, déporté à Dachau, Hersbruck, Flossenburg », des noms découverts pour la première fois par la famille. Cet « acte de disparition …n’est pas un acte de décès…sauf si les précisions nécessaires sont fournies » est-il indiqué.

Tel est le cas d’ailleurs, semble-t-il ! Le 30 novembre 1946, l’officier d’état-civil du ministère des Anciens combattants et victimes de guerre dresse l’acte de décès de Laulan André, Jean « le 8 novembre 1944 à Hersbruck (Bavière) » (attesté par monsieur Geumalmazian le 21 octobre 1946). C’est la date et le lieu qui figurent encore sur tous les actes officiels.

Pourtant…ils s’avèrent erronés !

En effet, le travail de recherche entamé par la famille en 2005, s’enrichit en 2009, de l’acte de décès de « …André Laulan…à Bergen-Belsen, le 10 novembre 1944, à 7h10… d’une tuberculose pulmonaire » transcrit le 11 novembre 1944 sur le « registre mortuaire de l’état-civil de Bergen-Belsen ».

André, en effet, après trois mois à Hersbruck, a été expédié, cinq cents kilomètres plus au nord, au « camp pour hommes » de Bergen-Belsen, le 26 octobre 1944, un « camp pour mourants » selon les termes du Mémorial de Bergen-Belsen, qui indique par ailleurs que « les désignations des causes du décès (ici la tuberculose) étaient généralement indiquées pour camoufler les véritables motifs des décès. »

Ainsi, soixante-cinq ans après la mort d’André, seront établis les véritables lieu et moment de son décès.

Mais ses parents, Andréa et Augustin, son frère René et sa belle-sœur Suzette, n’auront jamais connu la dernière étape de son calvaire. Et sa mère a vécu, toute de noir vêtue, le reste de sa vie.

André a été décoré, à titre posthume, de la médaille de la Résistance, de la Médaille Militaire, de la croix de Guerre 1939-1945 avec palme, de la médaille commémorative 1939-1945 avec barrette « Libération ».

Sources

  • Service historique de la Défense - DAVCC Caen : AC 21P 68916 / AC 21P 480 928
  • Archives départementales du Lot-et-Garonne : 940W56 – 1737W4 dossier 13 -1825W45
  • Archives départementales de la Gironde : 17W14 – 17W88 – 2097W636
  • Arolsen Archives :
  • Mémorial du camp de Flossenburg :
  • Mémorial du camp de Bergen-Belsen :
  • Archives privées : famille Laulan

Bibliographie

Jean Claude LAULAN, "Chronique d’un résistant ordinaire, en Gironde et Lot-et-Garonne", Editions Pleine Page, 2012